Sammy Davis , »Borgne, négro et juif »
L’homme qui meurt ce jour-là, le 16 mai 1990, semble avoir défié tous les préjugés raciaux de son siècle dans son pays, en plus d’être un des plus grands artistes du 20e siècle,
Sammy Davis Jr. lorsqu’il décède à l’âge de 64 ans, est célébré comme une grande célébrité du show-business américain.
Chanteur polyvalent, danseur et acteur accompli, il a mené une carrière éclectique tant sur scène que sur les écrans.
Et pourtant, ce n’était pas gagné d’avance.
Samuel George Davis, Jr. est né le 8 décembre 1925, à New York.
Il grandit à Harlem entre un père, Sammy Davis Sr., artiste de vaudeville, et une mère, Elvera Sanchez, une danseuse americano-cubaine qui, entre autres chose, fait partie du chœur de l’Apollo Theater. Autant dire que le spectacle, il l’a dans la peau.
Du reste, Sammy Jr. ne fréquente pas l’école.
Dès l’âge de 3 ans, il part en tournée avec un numéro de claquettes qu’il exécute avec son père et le danseur Will Mastin. Tous les trois forment un trio, « la bande de Will Mastin et le petit Sammy » qui perdurera jusque dans les années 1960.
Pendant la seconde Guerre mondiale, Davis sert dans la troupe de spectacle de l’armée américaine. Sa carrière décolle vraiment dans les années 1950, il se produit dans des boîtes de nuit, fait des enregistrements et apparaît à la télévision.
En 1956, il est en vedette à Broadway dans la comédie musicale « M. Merveilleux », dont il jour le rôle-titre. Son père et Will Mastin font également partie du show. .
En novembre 1954, la roue tourne. Il est victime d’un grave accident de voiture auquel il survit mais il a perdu son œil gauche.
Il reparaît quelque temps plus tard sur scène avec un cache-œil jusqu’à ce qu’il soit équipé d’un œil de verre, ce qui avec sa mâchoire saillante et le nez cassé lui donne une apparence particulière.
Alors qu’il est en convalescence à l’hôpital San Bernardino, en Californie, il reçoit la visite du grand chanteur, Eddie Cantor.
Celui-ci, d’origine juive lui-même, évoque avec lui des similitudes qu’il ressent entre la culture juive et noire.
Davis intrigué, commence à lire des ouvrages sur les Juifs et le judaïsme.
Quelque temps après, il entame un processus de conversion. Selon le rabbin William Kramer qui célèbre son mariage en 1961 avec l’actrice suédoise – et blanche – , May Britt (qui se convertit elle aussi au judaïsme), bien que Davis ait été publiquement connu et célèbre en tant que Juif depuis le milieu des années 50, c’est seulement en 1961 qu’il est formellement converti sous la tutelle du rabbin Harry Sherer à Las Vegas.
Le rabbin Kramer écrit que ce mariage vaut à la synagogue où il doit être célébré, le Temple Israël réformé à Hollywood, de nombreuses menaces dont en premier lieu celles de ses administrateurs qui demandent instamment au rabbin Max Nussbaum qui officie dans cette synagogue, de ne pas permettre cette cérémonie.
Nussbaum ne voulant offenser ni ses employeurs ni Sammy Davis, disparaît fort opportunément, « appelé » à d’autres affaires, et c’est son adjoint, le rabbin William Kramer qui officie pour la cérémonie qui se déroulera finalement au domicile de l’artiste.
La petite histoire raconte que, alors qu’il jouait au golf avec Jack Benny qui lui demandait à combien se montait son handicap, Samy Davis Jr aurait répondu : « Tu parles d’un handicap ! Je suis borgne, négro et juif ! ».
Tous ses biographes notent que Samy Davis qui a publié quatre ouvrages de Mémoires de son vivant, s’est constamment battu pour être accepté.
L’écrivain Lev Grossman écrit ainsi : « Tout l’être de Davis n’était qu’un cri hurlant d’insécurité qui couvrait tout autre émotion. Il avait terriblement soif d’affection, en particulier de personnes de race blanche, de préférence célèbres, et particulièrement de Frank Sinatra dont il attendu tout sa vie l’adoubement ».
Par Noam Mosséri – Juifs célèbres © Tous droits réservés